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Yvon, portrait d'un designer aux milles idées

L'Interview Tréso en 4 questions

21 février 2022

Quand on franchit la porte de la Tréso, on vient en curieux, en habitué, en nostalgique, en gourmand, mais peu importe la raison, l'enjeu est de se rencontrer, d'échanger, de développer de nouveaux projets au contact des pratiques des autres... C'est pour illustrer ce sens profond du projet coopératif que l'on vous présente aujourd'hui Yvon. Il a suivi le projet La Tréso depuis le début et a profité de l'émulation dès l'ouverture pour ajouter de nouvelles cordes à son arc, déjà bien étoffé ! 

Qui es-tu ?

Yvon Luneau, designer et habitant de Malakoff depuis plus de 10 ans. 

Quelques mots sur ton parcours ? 

Chaotique! Après des études d'agriculture et d'aquaculture, j'ai un peu voyagé. J'ai fait pleins de métiers différents jusqu'au jour où j'ai rencontré quelqu'un prêt à m'aider financièrement pour la création d'une structure. 

Ce fut les débuts d'une agence de commercialisation et d'accompagnement de créateurs contemporains des métiers d'art. Pour cela je suis passé par un incubateur d'entreprise innovante et j'ai ouvert une galerie de 200m2 à Bordeaux où je présentais plus de 80 créateurs (entre 2005 et 2009). C'est comme ça que je suis rentré dans le design d'objets. C'était essentiellement du  mobilier et des objets d'arts décoratifs. Une partie de ma famille était déjà dans les métiers d'art, je faisais de la photo et de la sculpture  depuis longtemps mais plus pour le besoin de m'exprimer. J'ai toujours été  très curieux et créatif (j'ai failli monter un élevage de crevettes au  Canada !). A la Galerie, on vendait du très haut de gamme, mais il nous manquait certains types de meubles, du coup j'ai commencé à dessiner des bibliothèques que je faisais faire par des ébénistes. Pour cela j'ai créé Shohan design.

En 2009, la Galerie a fermé mais j'ai gardé un lien fort avec plusieurs créateurs, sans camion et zone de stockage désormais. J'ai donc cherché une gamme de produits peu chers à produire, à faire moi-même et facile à commercialiser. J'ai choisi l'acier à découper au laser et à plier, facile à envoyer par colis. Tout rentrait dans mon appartement !

Puis j'ai commencé à faire des serres-livres, qui n'existaient pas sur le marché. J'ai tenté en me disant "soit c'est un marché de niche, soit ça ne marchera pas!" et aujourd'hui c'est l'essentiel de mes revenus ! 

Je me suis beaucoup auto-formé pour mon site internet... J'ai un côté très autodidacte, avec une démarche assez organisée et fonctionnelle en trouvant ma patte à chaque fois. J'ai fait une bibliothèque "bio" sans colle, en travaillant sur l'assemblage. Un jour, il y a environ huit ans, la directrice de la Médiathèque de Malakoff m'a demandé de lui proposé des idées de porte-manteau. Je leur ai fait une patère à croix mais avec pas mal de galères techniques... J'ai aussi fait le présentoir en inox du 1er étage et des présentoirs à DVD, et depuis la clientèle médiathèque se développe ! :)

Je fais de plus en plus d'objets sur commande et avec ces matériaux je suis loin de voir la fin de toutes les possibilités créatives. Je sors aussi du métal, pour répondre à la demande d'une crêperie parisienne pour leurs lampes (m'est venue l'idée de penser la lampe comme un œuf à l'envers). Je l'ai créé avec un verrerier et pour réduire les coûts j'ai décliné le même principe avec de vrais oeufs d'autruche aussi solide que du verre !

Pourquoi la Tréso ? Qu'y fais-tu ?

Je travaille pas mal en sous-traitance et une boutique à Paris a l'exclusivité sur mes ventes en magasin. L'époque de l'oeuf m'a incité à ressortir de mon matériaux de prédilection et l'ouverture de la Tréso est arrivé en parallèle. Encore une fois les rencontres y sont pour beaucoup : une cliente qui s'est lancée dans la cosmétique bio a vu mon dessous de plat et m'a demandé un logo, puis un site, puis une enseigne... Cela m'a donné envie de produire des produits dérivés en bois... à la Tréso ! J'avais rencontré Grégoire plus tôt grâce aux Fabriqueurs sans pouvoir m'investir beaucoup dans l'association... J'ai aussi utilisé la fraiseuse numérique de La Tréso pour une enseigne : c'était la première fois mais j'ai bien aimé cette possibilité d'apprendre, aller plus loin et voir les possiblités de chaque outil.

 

Comment imagines-tu la suite ?

J'ai sans cesse des idées. Par exemple, un concours à proposer aux plus jeunes, avec un accompagnement. Je sais aussi que je dois/souhaite développer des axes :

- mes réseaux sociaux : Instagram a beaucoup d'impact !

- les objets en bois : les marges ne sont pas du tout les mêmes donc il faut repenser le modèle économique... 

- Imaginer des bijoux et broches laissés à la vente à la Tréso par exemple pour ouvrir d'autres champs  avec ces machines numériques, avec d'autres types de bois, de cuir, de papier... 

Le risque est aussi de se disperser ! Si je le pouvais, je serais toujours en train de faire de la  recherche et de la création, mais c'est maximum 10% de mon temps. Je suis en statut auto-entrepreneur pour l'instant, ce qui allège toute la partie administrative qui n'est pas mon fort. Dans l'idéal, j'aimerais passer au statut d'artiste avec des partenaires fabricants car dans ce domaine ceux qui fonctionnent maitrisent tout de A à Z. J'ai aussi envie de me faire des choses pour moi à la Tréso (flocage de mes tee-shirts...). Bref, la liste est longue ! 

Merci beaucoup à Yvon pour son partage d'expérience et ses anecdotes !